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L’intelligence artificielle va-t-elle nous dépasser ?

Merci Arte de poser la question

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12 octobre 2018

Temps de lecture : 6 minutes

Imaginez un monde où vous sortez d’un rendez-vous médical avec le diagnostic avéré de votre maladie au bout de 15 minutes, après consultation par votre médecin traitant de 90 millions de dossiers médicaux, 30 milliards de radiographies et 200 millions de contrats d’assurance.

Imaginez un hôpital psychiatrique où le praticien détermine en utilisant un programme de reconnaissance faciale et vocale votre pathologie : schizophrène ou simple dépression.

Imaginez que toutes vos actions quotidiennes sont  facilitées par des chatbots conçus pour vous aider à résoudre vos moindres problèmes, satisfaire vos moindres désirs et modifient ainsi toute votre existence.

Ce monde existe déjà. Et le film-enquête de 54 mn, réalisé par Guillain Depardieu et Thibaut Martin diffusé actuellement sur Arte (Disponible du 29/09/2018 au 04/12/2018 en VOD et DVD), nous donne à voir l’IA, l’intelligence artificielle, qui pour le moment n’était qu’une ombre dans le brouillard de la recherche. Quelque chose d’omniprésent dont on ne distingue que les preuves d’existence. Le gentil robot Pepper n’étant qu’une carcasse design dotée d’un ordinateur programmé par des dialoguistes de talents. Un produit dérivé de grande consommation.

IA comme Intelligence artificielle. Elle fascine et inquiète. Ses contours sont flous comme le numérique à son émergence. Elle est partout et nulle part, comme un démiurge occulte. Le documentaire de Guillain Depardieu et Thibaut Martin sur Arte, bien documenté, nous donne à voir une silhouette, ni hostile, ni bienveillante, évite et joue des clichés pour mieux nous captiver.

Créature incestueuse du libéralisme et du numérique ou progrès technologique salvateur ?

L’intelligence artificielle va-t-elle nous dépasser questionnent les documentaristes. C’est aux USA qu’ils ont cherché une réponse. L’intelligence artificielle a déjà vaincu Kasparov sur son terrain, remportée un championnat de poker, à Pittsburg, battant ses adversaires en s’inventant lui-même sa stratégie de bluff. IBM a déjà installé, dans plusieurs centres médicaux, ses ordinateurs gavés de 2 300 publications spécialisées sur le cancer, de milliards d’informations : radios, scanners, tests sanguins…

Les recherches avancent vite déclare un chercheur « dans 2, 3 ans, les voitures sans chauffeurs seront monnaie courante sur les routes ». « Bientôt nous feront des choses impossibles à réaliser aujourd’hui » s’enthousiasme son collègue. Mais il manque aux robots le sens commun. « Intelligence artificielle, ou stupidité artificielle,  s’interroge un autre scientifique, le monde est trop complexe pour être compris par un ordinateur ».

D’inévitables disruptions économiques et sociales

Fin de la première partie qui renvoie l’image d’un univers futur lisse où IA comme Hal 9 000 au début de l’Odyssée, prévoit, facilite, protège et nous propulse dans  une société où nous serons tous musiciens ou danseurs en laissant la gestion du reste aux super ordinateurs.

Le développement de ces évolutions technologiques aux Etats-Unis n’est bien sûr pas un hasard de la recherche. Pour nourrir les travaux des scientifiques de Facebook, il y a les milliards de données fournies par les utilisateurs du média et les milliards de dollars tirés de l’utilisation de cette manne numérique et commerciale. Une puissance d’innovations sans équivalent.

Alors, comment éviter de diviser la société entre ceux qui maitrisent la technologie et les autres ? C’est la question que se posent les scientifiques aujourd’hui, conscients que cette transition industrielle, culturelle, sociétale, si elle est inéluctable, s’accompagnera de disruptions économiques et sociales : « Il faut réfléchir aux utilisations malsaines de l’IA » réagit un chercheur. Des métiers vont disparaître et il n’est pas certain, face aux fulgurantes évolutions technologiques à venir -promises par l’avènement de l’ordinateur quantique à l’horizon 2030- que les laisser pour compte de l’IA aient le temps de s’adapter. La révolution actuelle, à l’inverse des révolutions passées est rapide et brutale, en miroir des bouleversements climatiques. Les deux subissent les coups de boutoir de leurs effets de seuil.

Beaucoup de métiers sont à imaginer

La question de l’emploi et des qualifications devient un enjeu majeur même si une vision trop noire de la situation ne se justifie pas comme l’affirme une étude de France Stratégie : « la menace sur l’emploi semble très limitée ». Cédric Villani, dans une récente interview sur le site The Conversation  tempère : « On peut effectivement craindre une forte déstabilisation de l’économie liée à la montée de la robotisation et de l’intelligence artificielle. Mais en matière d’économie, rien n’est sûr, les prédictions sont sans cesse mises en défaut ». Sébastien Tran, directeur de l’EMLV (Ecole de management Léonard de Vinci), convoque la théorie de la destruction créatrice d’emploi : « L’IA qui devrait permettre d’automatiser certaines tâches répétitives, transformera de nombreux métiers : elle requerra une évolution forte des qualifications et des compétences […] Beaucoup de métiers sont à imaginer ».

L’enjeu est majeur pour le futur du travail affirme Cécile Dejoux du CNAM (Professeur des Universités en gestion au Cnam et Escp Europe) : « l’acculturation des collaborateurs aux transformations numériques est une première étape essentielle pour mener à bien l’intégration des systèmes d’intelligence artificielle ». Il faut transformer l’organisation du travail et accélérer l’introduction de nouveaux usages. « Nous n’avons plus le choix l’entreprise doit réussir sa transformation numérique en intégrant dores et déjà l’IA » conclut-elle.

La Commission européenne a décidé d’investir 1,5 milliards d’euros pour développer la recherche consacrée à l’IA entre 2018 et 2020. Les géants du numériques prévoient, eux, un investissement de 23 milliards de US dollars en 2024 (source : Statista).

La perspective de l’arrivée de l’intelligence artificielle dans le monde du travail, comme celle du numérique en son temps, risque de bousculer les acteurs sociaux s’ils n’anticipent pas cette évolution.

C’est pourquoi la CGT organise le 9 Novembre prochain un colloque intitulé : « Où va l’intelligence artificielle ? ». Six temps forts au programme : Qu’est-ce que l’IA ; Le rapport Villiani, ambition et moyens ; indépendance et maîtrise scientifique et technique ; la place l’homme ; impacts sur le travail, métiers et emplois, les ambitions de la CGT.

Une date à retenir : le 6 novembre 2018

 

 

Pour vous inscrire : https://www.weezevent.com/ia-cgt

 

par @jljulien

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